NE CHOISISSONS PAS DE VOIE SANS ISSUE
Par Patrice Cohen-Séat, Olivier Dartignoles, Brigitte Dionnet, Jean-François Gau, Elisabeth Gauthier, représentant du PCF au collectif national unitaire
in l'Humanité, 17 janvier 2006
Nous partageons avec José Bové, et avec des milliers de femmes et d’hommes dans et hors des collectifs locaux, la volonté acharnée de permettre un rassemblement antilibéral de gauche et une dynamique politique capables de créer l’événement en 2007 et les conditions d’un vrai changement. Après l’échec de la recherche d’une candidature unitaire à la présidentielle, nous avons affirmé que l’objectif du rassemblement demeurait essentiel. Nous avons maintenu notre proposition d’une campagne réellement collective, ouverte à celle et à ceux qui le souhaitent. Nous avons dit notre volonté de continuer ensemble dans les collectifs locaux – chacun décidant souverainement de sa façon de s’impliquer ou non dans la campagne – et avec le collectif national. Nous avons donc proposé que se poursuive le travail sur le programme et sur des candidatures communes aux législatives.
Aujourd’hui, José Bové, qui avait retiré sa candidature au moment de la consultation des collectifs, propose de nouveau aujourd’hui d’être le " nom " sur le bulletin de la présidentielle. C’est son droit le plus strict. Mais nous ne pensons pas que sa proposition, identique à celle qu’il exprime depuis des mois, permettre de dépasse le blocage sur lequel nous avons buté.
José souhaite que des dizaines de milliers de signatures sous la pétition pour sa candidature forcent " les appareils politiques à faire le choix d‘une candidature unitaire à l’élection présidentielle " et permettent de rassembler " l’ensemble des sensibilités et des personnalités qui ont participé à cette démarche depuis le printemps 2006 ".
Ceci est absolument illusoire.
S’agissant des sensibilités politiques, il ne peut ignorer les raisons, clairement exprimées par chacune, qui ont déterminé leurs positions. Elles font apparaître que la difficulté sur laquelle on a buté relevait des questions bien différentes de la simple recherche d’un " nom sur le bulletin ". Tout le monde sait pas exemple que le choix de la LCR de présenter la candidature d’Olivier Besancenot tient à son désaccord radical avec la stratégie décidée le 10 septembre et la question du " rapport au pouvoir ". Les socialistes du " non " ont dit clairement qu’ils liaient leur participation au rassemblement à une candidature socialiste en vue de la création d’une nouvelle force politique du type du Linkspartei allemand. D’autres se prononçaient pour une " candidature trait d’union " entendant par là le choix d’une personnalité peu connue qui ne mettrait en avant aucun des composantes, etc. Bref, la vraie question semble bien avoir été les forces différences de conception d’une " recomposition " de la gauche, problème qui excédait largement celui de la candidature. Et on ne voit pas bien en quoi le fait que José Bové repropose sa candidature changerait significativement l’état de cette question. Le pétitionnement pour José changerait-il alors la position des collectifs locaux auxquels il s’adresse ? Ceux-ci se sont exprimés deux fois, avant et après Saint-Ouen. Ils avaient parfaitement connaissance de la position de José Bové, telle qu’il la reexprime maintenant, de lier sa " disponibilité " au retrait des candidatures d’Olivier Besancenot et de Marie-George Buffet. Or, dans ces deux consultations, sur la base d’un débat politique sérieux, le choix le plus partagé des collectifs, et de loin, a été Marie George Buffet. Peut-on raisonnablement penser qu’une pétition nationale pour la candidature de Bové modifierait significativement cet état de fait ? Non pas qu’une telle pétition ne compte pas. Le fait que José Bové ait une notoriété nationale et que ses combats, notamment contre les OGN ou la " malbouffe ", lui aient donné une image positive dans l’opinion ont leur importance. Mais cet élément a bien évidemment été pris en compte par les collectifs dans leurs débats et dans leurs choix.
Notre conviction, au total, est qu’il ne faut pas aujourd’hui s’engager sur des pistes sans issue. A moins de cent jours du premier tour, face aux dangers de la droite et de l’extrême droit, on ne peut pas s’engager dans un processus qui conduirait à un nouvel échec. Devant le blocage apparemment indépassable que lequel nous avons buté pour la présidentielle, Marie George Buffet et le Parti communiste ont pris leurs responsabilités. Certains décident de s’engager dans cette campagne avec cette candidature, d’autres font d’autres choix. Ce qui importe le plus maintenant, c’est de tout faire pour clarifier les enjeux et permettre à notre peuple, à la présidentielle et aux législatives d’exprimer aussi fortement que possible sa volonté d’une alternative antilibérale de gauche. Et poursuivons le débat, agissons ensemble, sans que cela vaille quitus ou ralliement de qui que ce soit, à travailler pour l’avenir à l’objectif crucial pour notre peuple d’une nouvelle majorité à gauche permettant de battre la droite et de réussir enfin à changer la vie.